Sébastien Lifshitz est l’un des plus grands noms du documentaire en France. Il a été maintes fois récompensé pour la qualité de son travail dans de nombreux festivals et a reçu des prix prestigieux. Son dernier film en date est Madame Hofman. C’est une plongée dans l’univers de Sylvie Hofman, une infirmière en soins palliatifs à l’Hôpital Nord de Marseille vue à travers le prisme du regard plein d’empathie de Sébastien Lifshitz
Sébastien Lifshitz est connu pour avoir réalisé Les Invisibles qui obtint le César du meilleur documentaire et Bambi où il filma Marie-Pierre Pruvot, l’une des premières femmes transgenres françaises en 2014. Adolescentes est un autre documentaire tourné sur une durée de plus de 5 ans pour lequel, lors de la cérémonie des Césars, il remporta trois Césars (meilleur documentaire, meilleur montage et meilleur son). Le documentaire Petite fille, quant à lui, tourné pour la chaîne Arte aborde la thématique de la dysphonie de genre. Dans ce documentaire, le réalisateur suit pendant une année la vie de Sasha, une enfant de 7 ans, assignée garçon à la naissance. Casa Susana, lui est un documentaire sur une communauté clandestine de travestis aux États-Unis dans les années 1950-1960. Sébastien Lifshitz réalise aussi des longs métrage de fiction comme Plein sud avec Léa Seydoux, Yannick Renier, Pierre Perrier, Théo Frilet, Nicole Garcia, en 2010. C’est un réalisateur prolifique et la liste de sa filmographie est loin d’être exhaustive.
Son dernier film en date a pour titre Madame Hofman. Ce très beau documentaire nous immerge dans l’univers du personnel hospitalier, de ces hommes et de ces femmes sous-payés dans le public, de ces travailleurs de l’ombre, taillables et corvéables à merci que la crise du Covid a mis en lumière un laps de temps très court, tous les soirs, lorsque les gens les applaudissaient sur leur balcon afin de leur rendre hommage, avant de les laisser sombrer à nouveau dans l’oubli et l’indifférence.
» Bienvenue dans ma vie « , cette phrase, Sylvie Hofmann la répète à longueur de journée ou presque. Elle est cadre infirmière depuis 40 ans à l’Hôpital Nord de Marseille. Sa vie, c’est courir. Entre les patients, sa mère, son mari et sa fille, elle consacre ses journées aux autres depuis toujours. Et si elle décidait de penser un peu à elle ? De partir à la retraite ? En a-t-elle le droit, mais surtout en a-t-elle vraiment envie ?
Madame Hofman est «une Dame», elle a consacré sa vie aux autres. C’est une belle âme. Altruiste, elle n’a jamais pensé à elle. Simple, naturelle, directe, lumineuse, elle a un charisme indéniable.
Lors de notre rencontre Sébastien Lifshitz confie : « J’avais envie de faire le portrait d’une femme en lutte. Ma directrice de casting a donc lancé un casting sur les réseaux sociaux. Celui-ci n’a rien donné dans un premier temps puis un jour, elle m’a téléphoné et m’a dit qu’une femme nommée Sylvie Hofman l’avait contactée non pas pour elle mais pour lui donner des contacts susceptibles de correspondre aux critères du casting. Ma directrice de casting a alors voulu à tout prix que je la rencontre car elle avait été frappée par le charisme et la personnalité de cette infirmière. Celle-ci venait d’avoir un AVC et avait consacré 40 ans de sa vie à soigner des gens à l’Hôpital Nord de Marseille. J’ai suivi son conseil et effectivement, cela m’est apparu comme une évidence. Sylvie Hofman devait être le personnage central de mon documentaire. Lorsque je lui ai fait part de mon projet, Sylvie a été très surprise mais comme elle est curieuse et que c’est une aventurière, elle m’a dit: « On n’a qu’à essayer !» et elle m’a reçu dans l’intimité de son lieu de travail, au sein de son équipe qui se consacre avec abnégation, dévouement à ses patients en fin de vie, dans une unité de soins palliatifs. iIs ne croient plus aux politiques et à leurs promesses, ils le disent explicitement et pensent qu’entre la Peste et le Choléra, il leur est difficile de choisir. J’ai tourné ce documentaire à Marseille, à l’Hôpital Nord. Marseille est une ville où j’avais envie de planter ma caméra. J’aime la mixité sociale de cette ville, sa lumière. J’apprécie aussi les personnalités fortes qui y vivent et leur humour. Sylvie a pris sa retraite le 9 juillet dernier. Elle était à bout. Epuisée au physique et au mental. Elle ne regrette rien, ni d’avoir fait le film, ni d’avoir pris sa retraite après 40 ans où elle s’est consacrée aux autres.
Un beau film où Sébastien Lifshitz donne la parole à ces «invisibles» motivés et courageux qui pourtant sont essentiels à la société. Il nous les montre dans leur quotidien avec leurs doutes, leur courage, parfois leur humour ou leur découragement lorsqu’ils voient un malade les quitter. C’est un bel hommage et une belle reconnaissance de leur abnégation et de leur dévouement.
Sortie en salle : 10 avril 2024
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